28 Avril 2016
Si les réseaux sociaux permettent de rassembler les communautés ethniques entre elles, ils permettent aussi de fédérer des êtres aux pensées, aux goûts et aux intérêts proches – ceux que Maffesoli appelle les « tribus » : dès lors, par rapport aux autres, dans la multitude, chacun se définit par ses similitudes. Selon son expression, nous sommes passés d’une société qui distinguait les individus dans la masse à une « société individualiste de masse ». Comme en chimie dans la relation qui unit les éléments atomiques aux molécules qui les organisent, les éléments humains s’agrègent en structures sociales complexes.
Bachelard rappelle comme une évidence que l’homme a forcé la nature à aller aussi loin que son esprit. En technicisant son univers, il l’a centré sur lui-même. Il l’a fait passer du réel et du factuel au fabriqué et au factice. Ex « deus machina », il est devenu un « homo artifex ». Ce sont à présent ses artifices qui humanisent le naturel ; et ses images virtuelles qui virtualisent sa perception des êtres et des choses. Le monde numérique, avec ses avatars et sa cyberculture, envahit le monde réel, celui de la vie et de la culture. Nous vivons aujourd’hui à l’ère des choix somatiques (avec la contraception, l’euthanasie, la procréation médicalement assistée, la gestation par autrui), à l’ère des choix bioéthiques (avec les progrès génétiques, bio-, nano- et neurobiologiques), à l’ère des choix ontologiques (avec les visées post- et trans-humanistes) et à l’ère des choix téléologiques (avec les recherches quantiques, informatiques, électroniques, connectiques et cosmiques). Notre rapport au monde, la place de nos valeurs dans ce monde et notre manière de vivre le monde s’en trouvent profondément transformés.
Dans ce contexte, que deviennent les valeurs maçonniques ? Ne sont-elles pas périmées avec leur langage suranné (« creuser des cachots pour les vices ») et plus encore avec leurs pensées désuètes, fortement marquées de « Positivisme », comme le « perfectionnement de l’humanité » (pour le « culte social » de Comte), le « Grand Architecte de l’Univers » (pour la « religion du Grand Être »), « l’amour » pour principe, « l’ordre » pour base, « le progrès » pour but, « le cœur » pour guide et « l’intelligence » pour compagnon ?
Pour le savoir, commençons par récapituler ces valeurs ; ce sont :
Pour les conforter, l’enseignement maçonnique induit l’initié à :
La symbolique de la construction du temple (tant extérieur qu’intérieur à l’homme) est la pierre angulaire de la méthode maçonnique. Elle utilise les outils opératifs pour en faire symboliquement des outils spirituels : construire le temple, c’est construire à la fois le temple intérieur de l’homme et le temple extérieur de l’humanité.
En ce cas, pourquoi ne pas se contenter de la pensée et de l’action qui se suffisent à elles-mêmes ?